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Pourquoi est-ce que j’ai pleuré en mangeant du pad thaï

Depuis qu’on est parti du Québec, je pleure souvent.

Non pas de tristesse.

Ces temps-ci, au goût salé de mes larmes se mêle celui, plus doux, de la gratitude.

Le cœur peut-il exploser d’un trop plein d’émerveillement ?

À certains moments, je répondrais oui sans hésiter.

Comme la soirée où j’ai mangé un pad thaï à Bangkok. C’était la première fois depuis que j’avais mis les pieds en Thaïlande, il y a 8 ans, que je regoûtais à ce plat.

Et dès la première bouchée, je me suis mise à pleurer.

J’ai chassé le tout d’une bonne rasade de Chang – les vrais savent – et je me suis remise à pleurer.

Rien, absolument rien, ne se compare aux sensations qu’amène cette bière médiocre en chassant le piquant des chilis qui dansent sur la langue.

La capacité de la nourriture à nous replonger aux plus profond de nous souvenirs est ce qui se rapproche d’une machine à remonter dans le temps.

Ce pad thaï-là, c’était une capsule temporelle.

Ce pad thaï-là goûtait mes 22 ans.

Ce pad thaï-là goûtait la nostalgie d’un tout premier voyage en backpack.

Les découvertes, l’insouciance, l’éveil d’une curiosité. Et la magie dans tout ça.

Ce pad thaï-là goûtait aussi la victoire.

La victoire d’une promesse tenue à la Marie de 22 ans.

À la Marie de 22 ans qui, fraîchement revenue de Thaïlande à l’époque, proclama haut et fort : « un jour, je vais voyager ».

Je ne savais pas quand, encore moins comment. Mais je savais déjà que je refusais de laisser la vie m’arriver sans prendre les reines.  

À la Marie de 22 ans qui s’est butée à la peur : « mais t’es folle ! Pis le travail, lui ? »

La peur, cet outil bien tranchant quand on tente de couper les ailes.

Cette soirée-là, mon pad thaï goûtait le doigt d’honneur bien assumé.

Et c’est pour ça que j’ai pleuré, je crois.

Parce que j’ai honoré ma promesse, peu importe le jugement des autres.

Parce que je remettais les pieds là où l’étincelle est née.

Et parce que je mangeais un cristie de bon pad thaï.

Objectivement, était-ce le meilleur que j’ai eu la chance de manger ?

Je sais bien que non.

Même pas proche.

Mais cette soirée-là, nichée dans une allée d’un marché de nuit sur trame sonore de la discothèque, ce pad thaï-là était le meilleur pad-thaï sur la terre

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